À la lumière d’une récente déclaration faite le 2 novembre par le directeur du budget du Parlement canadien, le montant estimé à 53 milliards de dollars nécessaire à l’acquisition par le Canada d’avions de combat de cinquième génération Lockheed Martin F-35A auprès des États-Unis a suscité de vives inquiétudes. L’impact financier considérable et le risque de dépassements de coûts importants ont suscité des appréhensions notables.
Le ministère canadien de la défense prévoit d’investir 14,2 milliards de dollars pour l’acquisition de 88 avions de combat et des équipements connexes, soit environ 161 millions de dollars par appareil. Toutefois, en raison des dépenses opérationnelles élevées du F-35, bien connues pour un avion à moteur solitaire, on prévoit que la durée de vie de la flotte pourrait entraîner des coûts supplémentaires de près de 39 milliards de dollars pour le Trésor public.
L’acquisition d’un avion et de son équipement ne représente qu’un quart des dépenses totales. En fait, chaque avion devrait coûter plus de 600 millions de dollars au cours de sa durée de vie.
« L’échec du programme F-35 »
Le rapport du responsable du budget souligne un échec important du programme F-35 – un avion initialement conçu pour refléter les coûts opérationnels des F-16 et F-18 qu’il devait remplacer. Or, les coûts réels de vol et d’entretien se sont révélés nettement plus élevés. Cela a rendu le remplacement des F-16 dans l’ensemble de l’armée de l’air américaine prohibitif, obligeant le service à envisager d’autres solutions.

Le coût prévu de 53 milliards de dollars pourrait augmenter considérablement. Cela est principalement dû à deux facteurs importants : le risque tangible d’accidents découlant des pépins logiciels du F-35, qui ont déjà causé quelques crashs, et les problèmes opérationnels nouvellement apparus. Ces problèmes opérationnels ont nécessité des modifications coûteuses, ce qui a encore accru les coûts opérationnels.
Refroidissement inadéquat des moteurs
L’un des principaux exemples d’erreur de conception ayant entraîné une augmentation considérable des dépenses opérationnelles peut être attribué à la capacité de refroidissement inadéquate du moteur F135 de l’avion de chasse. Un examen effectué en juin par les auditeurs du Government Accountability Office des États-Unis a révélé une augmentation alarmante de 38 milliards de dollars des dépenses opérationnelles maximales pour la seule flotte américaine, principalement en raison de ce défaut.

Lorsque le F-35 commencera à être déployé à la norme Block 4 en 2024, les coûts de maintenance supplémentaires attribués aux besoins accrus en refroidissement et en énergie de la nouvelle modification devraient grimper en flèche. Cette escalade des coûts devrait se poursuivre jusqu’au remplacement du moteur. Il est également prévu que d’autres coûts opérationnels supplémentaires imprévus puissent continuer à apparaître à l’avenir.
Réduction des heures de vol
On prévoit que les dépenses liées à la durée de vie des F-35 pour l’armée de l’air canadienne seront considérablement inférieures à celles de leurs homologues américains. Cette réduction sensible des coûts est attribuée à la stratégie du ministère de la défense, qui consiste à réduire le nombre annuel d’heures de vol et à recourir davantage aux simulateurs pour la formation des pilotes.
Le directeur parlementaire du budget a émis une mise en garde concernant l’augmentation potentielle des coûts des F-35 utilisés par l’Armée de l’air royale canadienne. Ces coûts supplémentaires pourraient survenir si les avions sont utilisés au-delà du calendrier prévu par les planificateurs de la défense.
De plus, des retards dans la livraison des avions entraîneraient une augmentation significative de ces coûts. L’officier a déclaré : « Un retard d’un an dans l’arrivée des jets pourrait gonfler les coûts d’environ 400 millions de dollars. Si le retard se prolonge jusqu’à deux ans, l’augmentation des coûts pourrait atteindre environ 700 millions de dollars. »
Les livraisons prendront plus de dix ans
En raison de graves déficits de production, d’approbations prolongées pour la fabrication à grande échelle et de volumes de commandes importants de la part de pays disposant d’une flotte de chasseurs normalisée par l’OTAN, visant principalement à remplacer leurs F-16, la livraison des F-35 du Canada sera probablement achevée plus d’une décennie après la commande initiale, prévue en 2032. Toutefois, si l’on se réfère aux récentes livraisons d’avions de combat américains, il est plausible que les retards s’étendent bien au-delà de cette estimation.
En mars 2022, le ministère canadien de la défense a avancé son processus d’acquisition des F-35A, marquant ainsi la conclusion d’un long processus de sélection. Les avions achetés sont destinés à remplacer les chasseurs de quatrième génération CF-18C/D Hornet du pays, qui sont en service depuis les années 1980.
Le F-35A a notamment été choisi par trois des quatre forces aériennes occidentales – l’Australie, la Suisse et la Finlande – qui utilisent actuellement des F-18C/D. On s’attend de plus en plus à ce que l’Espagne, le quatrième pays, opte également pour le F-35A.
La position unique du F-35
La position unique qu’occupe le F-35 en tant que seul avion de combat de la quatrième génération compatible avec l’OTAN actuellement en production lui a permis de devancer systématiquement les autres classes d’avions de combat occidentaux lors des appels d’offres. Son avantage distinctif provient de son avionique sophistiquée et de ses capacités de furtivité.
Bien qu’il ne se soit engagé à aucune acquisition, le Canada a contribué de manière significative au programme F-35 en tant que partenaire industriel, injectant 613 millions de dollars dans l’initiative entre 1997 et 2021.
Sous la direction du Premier ministre Justin Trudeau, Ottawa a maintenu une position de non-engagement à l’égard de toute proposition d’acquisition tout au long des années 2010, M. Trudeau ayant même critiqué l’avion de combat en le qualifiant de « système non fonctionnel et loin d’être opérationnel ». Les révélations sur les coûts anticipés ont relancé la controverse sur l’achat de l’avion de chasse.